Plus-value immobilière et travaux réalisés après l’achèvement : exclusion des dépenses de matériaux

  1. Le Conseil d’Etat vient de mettre fin à un débat qui opposait l’administration à la juridiction administrative concernant la prise en compte des dépenses de matériaux en majoration du prix d’acquisition pour le calcul de la plus-value immobilière des particuliers.

    Postérieurement à l’achèvement de l’immeuble, l’article 150 VB-II-4° du CGI prévoit que les dépenses de construction, de reconstruction, d’agrandissement, de rénovation ou d’amélioration, supportées par le vendeur et réalisées par une entreprise, viennent en majoration du prix d’acquisition lorsqu’elles n’ont pas été déjà prises en compte pour la détermination de l’impôt sur le revenu et qu’elles ne présentent pas le caractère de dépenses locatives.

    Dans la mesure où l’article 150 VB-II-4° du CGI prévoit que les travaux doivent avoir été « réalisés par une entreprise », l’administration en tire les conséquences que ne peuvent venir en majoration du prix d’acquisition :

    • les travaux réalisés par le contribuable lui-même ou par une tierce personne autre qu’une entreprise (ex : main d’œuvre salariée) ;

     

    • le coût des matériaux achetés par le contribuable même si leur installation est effectuée par une entreprise. Les dépenses liées à l’installation des matériaux facturées par l’entreprise sont en revanche prises en compte en majoration du prix d’acquisition, toutes conditions étant par ailleurs remplies. BOI-RFPI-PVI-20-10-20-20-20131220, n°220

    Depuis 2011, plusieurs décisions de la juridiction administrative contredisent cette doctrine.

    • La Cour Administrative d’Appel de Nantes, a réitéré sa solution dans une décision en date du 22 janvier 2015 (13NT02327) précisant que « les dispositions de l’article 150 VB du CGI ne font pas obstacle à ce que le prix d’acquisition de matériaux et celui de leur pose soient pris en compte lorsque les matériaux ont été achetés par le contribuable à une entreprise et installés par une autre entreprise ».
    • La Cour Administrative d’Appel de BORDEAUX, a le 8 février 2018, n°15BX03667 rendu une décision dans le droit fil des décisions de la CAA de Nantes : « contrairement à ce que soutient l’administration pour justifier initialement le rejet de ces factures, les dispositions de l’article 150 VB du code général des impôts ne font pas obstacle à ce que le prix d’acquisition de matériaux et celui de leur pose soient pris en compte lorsque les matériaux ont été achetés par le contribuable à une entreprise et installés par une autre entreprise. »Dernièrement la Cour Administrative d’Appel de Lyon avait rendu une décision prenant une nouvelle fois le contrepied de la doctrine fiscale concernant la prise en compte, pour le calcul d’une plus-value immobilière, en majoration du prix d’acquisition des factures de matériaux supportées par le vendeur. (Arrêt de la CAA de LYON, 2ème chambre du 3 mai 2018, 16LY03935

    La Cour de Lyon allait même plus loin puisqu’elle estimait que le prix d’acquisition des matériaux et celui de leur pose pouvaient être pris en compte (en majoration du prix d’acquisition) même lorsque les matériaux ont été achetés par le contribuable à une entreprise et installés par une autre entreprise mais à la condition que ces dépenses puissent être rattachées avec certitude aux travaux de construction, de reconstruction, d’agrandissement ou d’amélioration réalisés par une entreprise intervenant sur le chantier.

    Sur pourvoi du ministre de l’action et des comptes publics enregistré le 21 juin 2018, le Conseil d’Etat vient de censurer l’arrêt de la CAA de Lyon, sifflant ainsi la fin de partie de ce courant jurisprudentiel contestataire.

    Pour le Conseil d’Etat, il résulte de la lettre même des dispositions de l’article 150-VB du CGI « qu’elles font obstacle à ce que le cédant puisse majorer ce prix d’acquisition des dépenses qu’il a supportées pour acquérir lui-même les matériaux nécessaires à la réalisation de ces travaux, dès lors que ces dépenses ne sont pas des dépenses exposées par une entreprise dans le cadre des prestations prévues par ces dispositions. Est sans incidence à cet égard la circonstance que le cédant confie à une entreprise la réalisation de travaux en vue desquels il a procédé à cette acquisition. »

    Selon la haute juridiction administrative, en jugeant comme elle l’a fait la cour, a méconnu les dispositions de l’article 150 VB du CGI et entaché par conséquent son arrêt d’une erreur de droit. 

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