L'entreprise Chaix immobilier implantée sur le secteur de Marseille Est, dévelloppe ses compétences dans le domaine de la transaction et la gestion locative depuis plus de 20 ans.
Nous vous proposons de retrouver un article de Maître Romain Rossi-Landi, concernant la procédure d’expulsion depuis la loi Alur.
La loi n° 2014-366 du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové dite loi ALUR dont le chapitre 1er du titre 1er s’intitule « Améliorer les rapports entre propriétaires et locataires dans le parc privé » n’a manifestement pas répondu à son objectif.
La procédure d’expulsion reste un véritable parcours du combattant.
Voici donc quelques conseils sur les réflexes utiles pour mener à bien, en perdant le moins de temps possible, une procédure en recouvrement de loyers impayés et en expulsion du locataire.
En cas de non-paiement du locataire, le premier réflexe est de lui faire délivrer le plus rapidement possible par huissier un commandement de payer visant la clause résolutoire du bail prévue pour le défaut de paiement du loyer et des charges.
Depuis le 1er janvier 2015 (Art. 27-II de la Loi ALUR), une nouvelle obligation pèse sur le bailleur qui doit signaler le cas à la Commission de coordination des actions et de prévention des expulsions locatives (Ccapex). Le bailleur doit « signaler dans les conditions réglementaires aux organismes payeurs des aides au logement » les impayés de loyer au moins deux mois avant l’assignation (sous peine d’irrecevabilité de celle-ci). Encore une formalité supplémentaire à accomplir par l’huissier à la charge du bailleur.
La clause de résiliation de plein droit ne produit effet que deux mois après un commandement demeuré infructueux délivré par acte d’huissier. Ce délai est ramené à un mois en cas de location meublée.
Sous peine de nullité, le commandement doit reproduire intégralement la clause résolutoire insérée au bail, ainsi qu’un certain nombre de dispositions légales pour informer le locataire de ses droits, notamment celui de saisir le juge du tribunal d’instance pour obtenir, le cas échéant, des délais de paiement.
Si le locataire ne se libère pas de ses obligations dans le délai de deux mois, la clause résolutoire reprend son plein effet et le locataire est déchu de tout titre d’occupation.
Le bailleur doit alors assigner en référé le locataire devant le juge d’instance du lieu de situation de l’immeuble pour faire constater la résiliation du bail et demander sa condamnation provisionnelle au paiement des arriérés de loyer.
Attention, l’assignation doit être notifiée également au préfet (par lettre recommandée avec A.R) deux mois au moins avant l’audience.
Cela fait déjà un délai incompressible de quatre mois minimum depuis le commandement de payer initial.
La date d’audience est fixée par le greffe et dépend donc de l’encombrement du Tribunal d’instance et de la période de l’année. Les délais d’audiencement sont très différents d’un tribunal d’instance à un autre. Les délais sont en général beaucoup plus longs dans les tribunaux d’instance de banlieue que dans ceux de Paris.
Il est par ailleurs fréquent que l’affaire ne soit pas plaidée à la première audience ni même à la seconde, en cas de demande de renvoi justifiée du locataire. Cette demande de renvoi est notamment automatiquement accordée quand le locataire sollicite la désignation d’un avocat à l’aide juridictionnelle, ce qui peut prendre plusieurs mois.
Il faut également garder à l’esprit que le juge saisi n’est pas tenu de constater la résiliation du bail, même si les délais du commandement sont expirés. Il peut suspendre les effets de la clause résolutoire et accorder d’office au locataire des nouveaux délais de paiement (désormais jusqu’à trois ans au lieu de deux ans auparavant) s’il estime que ce dernier à la possibilité et les moyens de régler ses arriérés [1].
Si le locataire ne respecte pas cet échéancier, la suspension de la clause résolutoire prend fin et son expulsion devient possible, à condition que le bailleur ait obtenu du juge une clause dite de « déchéance du terme ».
À noter que le juge ne rend pas son ordonnance sur le siège et fixe en général son délibéré un mois ou deux mois plus tard. Le délai s’allonge encore.
Une fois l’ordonnance d’expulsion rendue, il faut la notifier au locataire.
Une fois cette décision de justice ordonnant l’expulsion du locataire et sa condamnation aux arriérés de loyer, il faut encore lui faire délivrer un commandement d’avoir à libérer les locaux dans les deux mois par acte d’huissier.
Ici encore, il faut notifier (par lettre recommandée avec A.R) le commandement au Préfet et attendre deux mois supplémentaires.
L’article L 412-1 du Code des procédures civiles d’exécution interdit en effet toute expulsion avant l’expiration d’un délai de deux mois suivant le commandement d’avoir à libérer les lieux, dès lors que l’expulsion porte sur un local affecté à l’habitation principale de la personne expulsée ou de tout occupant de son chef. Il s’agit pour la personne expulsée d’organiser son relogement et son déménagement. Ce délai est de rigueur et son non-respect peut entraîner la nullité de la procédure.
Mais le locataire a encore la possibilité de demander des délais soit au juge des référés après l’ordonnance d’expulsion, soit au juge de l’exécution (JEX au TGI) après la signification du commandement d’avoir à libérer les locaux (délai de grâce).
L’article L 412-3 du Code des procédures civiles d’exécution donne la faculté au juge d’accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou à usage professionnel, dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement, chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales, sans que ces occupants aient à justifier d’un titre à l’origine de l’occupation.
La durée de ces délais ne peut, en aucun cas, être inférieure à trois mois ni supérieure à trois ans. Pour la fixation de ces délais, il est tenu compte de la bonne ou mauvaise volonté manifestée par l’occupant dans l’exécution de ses obligations, des situations respectives du propriétaire et de l’occupant, notamment en ce qui concerne l’âge, l’état de santé, la qualité de sinistré par faits de guerre, la situation de famille ou de fortune de chacun d’eux, les circonstances atmosphériques, ainsi que des diligences que l’occupant justifie avoir faites en vue de son relogement.
Ces délais supplémentaires sont donc accordés aux personnes de bonne foi car le premier délai légal de deux mois ne peut être réduit ou supprimé qu’en cas de voie de fait (notamment pour les squatteurs).
Ces délais sont cumulatifs et se combinent avec la trêve hivernale prévue à l’article L 613-3 du code de la construction et de l’habitation.
En effet il faut également tenir compte de la période hivernale qui s’étend désormais du 1er novembre au 31 mars de l’année suivante [2] pendant laquelle toutes les expulsions sont suspendues.
Pendant ces délais incompressibles, il n’est pas rare que l’occupant, devenu sans droit ni titre, n’ayant plus rien à perdre, ne procède désormais à plus aucun règlement, tout en se maintenant dans les lieux.
Le bailleur doit donc se montrer très patient et il n’est pas arrivé au bout de ses peines.
Même après avoir épuisé tous les moyens légaux, il n’est pas rare que le locataire se maintienne dans les lieux en l’absence d’exécution de la décision d’expulsion.
Dès lors que l’ordre public n’est pas en cause, l’Etat qui a été sollicité, a l’obligation de fournir son concours à l’expulsion et il ne peut s’y soustraire sauf à voir sa responsabilité engagée. Le bailleur peut réclamer à l’Etat l’indemnisation du préjudice qu’il subit du fait de la carence de ce dernier [3].
Il arrive fréquemment qu’un commissaire de police requis par l’huissier du propriétaire, pour exécuter la décision d’expulsion, fasse état d’instructions reçues de la préfecture, ou de l’absence d’instructions, pour ne pas exécuter une décision d’expulsion.
Dans ce cas, le propriétaire doit charger son huissier de faire sommation au commissaire de police compétent d’exécuter la décision d’expulsion.
Si le commissaire oppose une fin de non-recevoir, le propriétaire est alors fondé à former un recours pour refus de concours de la force publique devant le préfet de police, puis, dans le cas d’un rejet exprès ou implicite de ce recours, à saisir le tribunal administratif afin de demander l’annulation de la décision de refus de concours et l’allocation de dommages et intérêts.
S’il refuse de faire intervenir la police, le préfet est tenu de motiver sa décision. S’il ne le fait pas, le bailleur doit adresser (par lettre recommandée avec accusé de réception) une demande d’indemnisation à la préfecture. S’il n’a pas répondu dans les quatre mois, le bailleur peut saisir le tribunal administratif dans les deux mois.
Dans ce cas, le tribunal administratif donne pratiquement toujours satisfaction au bailleur (après une longue procédure).
Attention, la loi Alur, du 24 mars 2014, punit désormais de trois ans d’emprisonnement et de 30.000 € d’amende le fait de forcer une personne à quitter les lieux sans avoir obtenu le concours de la force publique !
On constate donc qu’obtenir l’expulsion d’un locataire pour non-paiement de loyer est très long et toujours aléatoire, puisque cela dépend d’abord des délais légaux de procédure, puis de la clémence du juge et enfin du bon vouloir de l’autorité publique.
Cette situation pose souvent de très graves difficultés pour des propriétaires bailleurs qui se retrouvent pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, avec un locataire qui ne paye plus aucun loyer.
Voici donc quelques conseils pour se prémunir et essayer tant bien que mal de ne pas perdre trop de temps.
Il faut garder à l’esprit que le propriétaire poursuit deux objectifs :
Avant la signature du bail, il faut donc demander à son locataire ses coordonnées bancaires ainsi que celles de son éventuelle caution.
En conclusion, on s’aperçoit que la loi ALUR du 24 mars 2014 n’a absolument pas facilité la procédure d’expulsion et qu’au contraire, elle est venue protéger encore d’avantage les locataires.
Il faut un très long délai – deux ans au minimum – pour que le bailleur puisse faire valoir ses droits en cas de non-paiement du loyer de son locataire.
On comprend mieux le succès des assurances locatives et pourquoi certains bailleurs demandent des garanties de solvabilité très importantes – ou des cautions – avant d’accepter de donner leur bien en location.
Bref, la situation du bailleur reste toujours aussi aléatoire et plus que jamais l’expulsion du locataire pour impayés de loyer reste un long chemin parcourus d’embûches.